Le cancer, nouvel enjeu sanitaire de l’Afrique

Afrique cancer
Les Africains croyaient que le cancer était une maladie des riches. Ils savent aujourd'hui qu'elle frappe aussi les plus pauvres. Les chiffres, lacunaires, rendent mal compte de cette nouvelle réalité sanitaire du continent. 847 000 nouveaux cas de cancers ont été recensés par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en 2012, une incidence encore bien inférieure à celle des pays développés. Mais ce bilan laisse de côté les nombreux pays où il n'existe pas encore de registre dans lequel consigner le nombre de malades.

Les yeux rivés sur les grandes épidémies - paludisme, sida et aujourd'hui Ebola..., les gouvernements ont longtemps ignoré cette pathologie de « l'homme blanc vieillissant. » C'est en train de changer. L'espérance de vie a augmenté – de sept ans par exemple au Sénégal et de 11 ans au Mali entre 1990 et 2012. Si il y a peu, les Africains n'avaient pas le temps de mourir du cancer, ils sont désormais confrontés aux inconvénients du vieillissement. Les estimations publiées par Globacan en 2012 annoncent une hausse de la mortalité de 45 % d'ici 2 025.

Les femmes de 45 à 55 ans, premières victimes

« Chez nous, le cancer est devenu un problème de santé publique » reconnaît la ministre de la santé de Côte d'Ivoire, Raymonde Goudou-Coffie. De passage à Paris, mardi 3 février, à l'occasion de la première journée africaine organisée dans le cadre du Congrès mondial des traitements anticancéreux, la ministre ex-pharmacienne- a brossé le tableau d'une politique contrainte de faire feu de tout bois pour tenter de palier le manque de ressources financières.
« Une campagne contre le tabagisme a été lancée et nous avons interdit la cigarette dans les lieux publics. 16 000 jeunes filles ont été vaccinées pour prévenir le cancer de l'utérus. Une convention a été passée avec le laboratoire Roche pour offrir une thérapie ciblée à 5 000 femmes atteintes d'un cancer du sein », a détaillé Mme Goudou-Coffie.
La Côte d'Ivoire qui fait partie des quelques pays à avoir adopté un Programme national de lutte contre le cancer, doit aussi gérer les conséquences d'une pollution environnementale massive. « Nous avons constaté une fréquence particulièrement élevée des cas de cancers du sein et de la gorge sur les lieux de déversements de déchets toxiques. Une évaluation est en cours. »

En Afrique subsaharienne, le cancer représente désormais 10 % à 20 % des pathologies chroniques observées. Il touche en priorité les femmes de 45 à 55 ans. Les cancers « classiques » du sein, du col de l'utérus, pour les femmes, de la prostate pour les hommes sont les plus fréquents. Mais l'Afrique produit aussi ses propres spécificités.
« Les mélanomes de la plante du pied sont devenus courants en zone rurale. Les albinos développent des cancers de la peau en raison de la forte exposition aux rayons ultraviolets et les hommes sont aussi atteints de cancer du sein », constate le professeur Charles Gombe Mbalawa, chef du service de cancérologie du Centre hospitalier et universitaire de Brazzaville.

La forte prévalence du VIH favorise aussi l'installation de certains virus dans l'organisme, vecteurs de cancer de l'estomac et de la vessie. L'hépatite B, très répandue, peut conduire à des cancers du foie. Plus qu'ailleurs, les enfants développent des cancers des yeux ( retinoblastome) produisant des tumeurs qui déforment le visage faute d'avoir été dépistées à temps.

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